Christian Bauwens est agriculteur à Ellezelles. Avec le "Groupement des fermiers des Collines", il mûrit depuis quelques années - avec le soutien du GAL - un projet hors des sentiers battus : la production locale d'une variété de blé d'où seront issus une farine et un pain estampillé "Pays des Collines".


 

 

 

Objectif : maîtriser le circuit de production, de la semence de blé au pain cuit par les boulangers du Pays des Collines.

Reportage réalisé en 2005

 

Séménil depuis toujours

"... Nous sommes au Séménil à Ellezelles. Je pense que c'est un des rares coins encore préservés, où il n'y a pas de bâtisses nouvelles, où une bonne communication règne entre les anciens et les nouveaux venus, "les nouveaux ruraux". Tout s'articule de façon relativement harmonieuse. C'est un très beau coin que j'apprécie tous les jours de plus en plus. On sent la terre, on sent l'endroit. Il n'y a rien d'artificiel.

Ici, c'est ma maison natale. Cela fait 56 ans que j'y habite. Je suis fils unique. Je suis marié avec Monique. J'ai trois enfants, deux filles, un garçon. Je pense que la famille a toujours habité plus ou moins ici de génération en génération. C'est pour ça que je tenais à y rester. Nous avons pratiquement une bonne partie de la ferme qui est en propriété. J'avais envie de continuer la ferme malgré le fait que j'ai fait d'autres études - techniques - et travaillé pendant 7 ans dans une firme américaine de composants électroniques comme contremaître..." 

La nouvelle vie 

"... J'ai repris la ferme fin des années 70. Puis j'ai construit directement une nouvelle étable. Un an après, j'ai fait une dépression ce qui a mis la ferme en léthargie pendant une petite dizaine d'années. Puis un peu à la fois je me suis réveillé et maintenant ça fait 10 ans que je suis revenu en pleine forme. Le côté positif de ces ennuis de santé, c'est que ça m'a fait découvrir pas mal d'autres choses qui m'ont remis en question. J'ai fait une psychanalyse et je suis très content de l'avoir fait. Cela m'a permis de voir les choses d'une façon différente et de sûrement les apprécier beaucoup plus qu'auparavant, de me prendre en charge et pouvoir dire "Moi, je".

Revenir à la ferme, c'était aussi le retour à une vie d'indépendant où on doit se prendre en charge soi-même, le retour vers certains petits ennuis matériels parce que les prix ne suivent plus dans l'agriculture... Alors, j'essaie de trouver d'autres voies de diversification afin d' améliorer le rendement financier, obtenir une certaine satisfaction et une certaine qualité de vie.... "


La ferme et son environnement


Une pratique commune

"... Nous avons un handicap que pratiquement tous les fermiers ont par ici : nos exploitations ne sont pas grandes et malgré que le paysage est très beau, nos terres sont morcelées et pas de la meilleure qualité avec un relief relativement accidenté. Le deuxième handicap, c'est qu'à cause de ma maladie, la ferme est restée un peu en sommeil quelques années et finalement elle m'a coûté de l'argent plutôt qu'elle m'en a rapporté. C'est pour optimaliser l'utilisation du matériel qu'entre temps j'ai créé avec d'autres fermiers ce qu'on appelle un CUMA, une centrale d'utilisation de matériel agricole - une pratique fréquente en France - qui nous a permis d'acheter du matériel et de mettre tous nos efforts en commun, de dépendre de moins en moins de l'entreprise agricole et de limiter au maximum les frais. Il faut savoir que le matériel ne vous appartient pas, qu'il peut être utilisé par d'autres personnes et que vous avez parfois le risque de devoir attendre un jour ou un demi-jour pour pouvoir utiliser ce matériel. L'avantage, c'est que plutôt que de coûter des sommes folles, vous payer le matériel au prorata de l'utilisation que vous en faites. Je trouve que c'est une pratique qui devrait se développer dans les petites fermes d'ici... "



Vers la ferme des Bauwens- no 25

 


Christian Bauwens

 


Devant la ferme

Du pain et de l'huile colza

"... Dans cette optique, je travaille sur 2 projets de diversification : le premier est d'arriver à faire du pain issu de blés cultivés dans le Parc naturel du Pays des Collines à base d'une farine sans ajout, ni améliorant, ni acide ascorbique, ni rien du tout... Le deuxième, c'est produire de l'huile colza pour faire un carburant propre pour véhicules. Maintenant c'est toujours une question de défiscalisation pour qu'un processus soit viable mais pas mal de réalisations ont été menées dans la recherche, la faisabilité et la viabilité de ces 2 projets.

La superficie de la ferme se situe aux alentours de 36 ha. Nous produisons du lait avec une sélection au niveau bétail laitier pour que ces bêtes donnent un rendement laitier le plus haut possible. Grâce à un inséminateur, j'ai pu  améliorer cela très fort. Je produis aussi des betteraves et du blé. Pour le blé, sur conseil de la ferme Jorion de Frasnes, j'ai poussé depuis quelques années à mettre du blé à haute valeur boulangère. Maintenant je voudrais créer ce qu'on appelle un circuit court de production afin que l'on soit maître le plus possible de notre production du début à la fin. Si nous arrivons à faire du pain pour le blé que nous produisons avec l'appui d'une coopérative pour commercialiser le blé et la farine, nous pourrons établir des partenariats avec les boulangers pour réduire les marges entre le prix de vente de notre blé (habituellement aux alentours de 10 cts € du kilo) et le prix auquel les boulangers achètent leur farine (aux alentours de 45 cts). Il y toute une marge qui est prise par d'autres personnes sur notre dos et ça, j'aimerai qu'on le récupère ! ... "

 

 

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