Hors des
sentiers agricoles
" ... Au départ, le projet du blé et du pain s'est fait un peu à tâtons parce que c'est un projet
qui va un peu à contre-courant de tout ce qu'on nous a appris aussi bien sur le terrain
qu'à l'école et dans des réunions agricoles. Et puis, avec Leader +,
et le groupement des fermiers des Collines, nous sommes devenus membres
du GAL du Pays des Collines. Pour être davantage visible dans notre projet, pour avoir
une promotion, du soutien et des aides financières afin que ce projet, quand il sera
vraiment au point, puisse être viable...
"

Tournez Moulins...
En produisant notre blé nous devons être sûr et certain à
100 % d'avoir en retour le même blé, "Notre" blé. Parce que nous précisons que le blé
est cultivé dans le Parc
du Pays des Collines, que nous garantissons la qualité de blé,
son origine, l'endroit où il a poussé et été récolté. Nous devons aller jusqu'au bout de ce
raisonnement.
Dans la région, il y a des moulins industriels. A Anvaing, à
Escanaffles mais on n'y pourrait pas facilement
garantir que le blé qui y sort est notre blé à nous avec la
traçabilité la plus complète possible. Donc on doit se tourner
vers un petit moulin. J'ai essayé d'en trouver un dans la
région qui nous apporte tous les
conseils judicieux tout en donnant un
suivi, ce que je n'ai pas trouvé. J'ai quand même découvert
un moulin dans le Nord de la France spécialisé dans des
farines sans ajout avec des anciennes variétés de blé. Ce
moulin est relativement petit mais du point de vue technologie, il
est à l'avant-garde. Ils font de la farine sur des cylindres
comme tous les moulins le font. Mais ils ont en plus une unité qui
fabrique de la farine uniquement avec le frottement de la matière
avec des vitesses de soufflerie différente et c'est le choc
entre les graines qui fait la farine..."


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Tout
à y gagner
"... Sur ce projet, la plus value financière existe. Pour vous donner un exemple, le blé que nous
produisons cette année en 2005 se négocie chez le meunier en France à la frontière française à
12,5 cts € plutôt qu'à 10 cts chez un meunier classique. Pour revenir aux anciens
FB, ça veut dire qu'il y a quand même 2 francs de plus value au kilo. Maintenant si nous pouvons tenir le
circuit en main, il y aura aussi des bénéfices sur la vente de la farine et nous pourrions
facilement avoir entre 3 et 4 francs FB au kilo. Ce qui ferait un bénéfice de 5 FB en plus sur le
blé par rapport au circuit traditionnel. D'autre part, dans notre pratique agricole, nous
n'allons plus semer autant de graines de blé à l'hectare mais semer plus espacé, c'est-à-dire moins de
kilos de semences à l'hectare. Cela veut dire, dans l'apport nutritionnel d'azote et
d'engrais, une répartition différente de ce qu'on faisait avant et un choix plus judicieux dans les
produits à pulvériser. Une approche différente à la moisson aussi :
nos blés attendront d'être vraiment murs et non saisis comme maintenant
quand il fait très chaud et qu'il sont bons aux analyses à un
instant précis et que le lendemain ils ne le sont plus. Nous aurons alors un
maximum de potentialités pour faire une bonne farine...
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Les voies du futur
"... Une fois tout à fait opérationnels, nous allons chercher
d'autres boulangeries dans le Pays des Collines. Nous avons
introduit une demande de subsides au Ministère de l'agriculture
qui serviront à faire des analyses et à engager 2 personnes pour étudier si des marchés existent
ou si on peut développer des marchés dès septembre 2005 après la
récolte. Si nous commençons, nous devons avoir de la réserve pour pouvoir tenir tout le reste de
l'année, pour faire la jonction jusqu'au mois d'août,
septembre suivant. Voilà le défi !
Certains regardent ça avec étonnement avec un sourire en coin.
D'autres qui ont aussi un sourire au coin se demandant : "tiens
finalement, est-ce qu'il n'aurait pas raison ?" Moi, je vais avoir 56
ans. Je me "permets" de faire certains petits essais par curiosité et aussi parce que cela pourrait
ouvrir des voies pour mon beau-fils fermier. Nous sommes aussi dans un parc naturel et je
crois un peu, pour le colza, à l'énergie, je ne dirai pas
verte, mais à l'énergie propre. Je crois également à la farine propre à travers le
blé, sans dire pour autant que les autres ne sont pas
propres, mais c'est un retour aux sources...
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La
multiplication des pains
"... Le meunier français m'a procuré une variété de
blé que avons moulu afin de réaliser un essai de pain. Le boulanger Michel
Wilkin d'Ellezelles en a fabriqué une cinquantaine et là, le pain était
valable avec une certaine hauteur. La mie était bonne et avait un aspect
commercial, parce que du
côté boulanger, c'est important cet aspect commercial, bien
rond... Il ne veut pas d'aspect artisanal, c'est-à-dire une fois un pain
haut, une autre fois un pain trop fin... L'essai avec le pain était
de qualité industrielle mais avec une farine exempte d'ajouts. Le boulanger
Wilkin joue le jeu avec nous et nous suit un peu de tous les
côtés. C'est lui qui a fait les essais avec les blés à haute valeur protéinique et
l'essai 2004 avec le blé que nous avons trouvé en France et
qui est cultivé maintenant par ici. C'est comme ça que nous pouvons dire que le projet est possible et
qu'il est possible de faire du pain. Le point un peu négatif,
c'est que
çela demande un peu plus de temps au boulanger pour faire le pain et un peu plus de travail
qu'avec de la farine industrielle. Il y a des temps de pause un peu plus
lent. Il faut laisser le temps à la farine de réagir avec la
levure, alors qu'avec les farines industrielles, le processus est acceléré avec des produits
adjuvants. J'ai appris - et les meuniers ne le disent pas - qu'on peut mettre 6, 7, 8 produits différents dans la farine pour que le pain ne rate
jamais. Il faut donc laisser du temps à la nature pour faire son
travail, mais combien le pain est bon après..."
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